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Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 3, 1763.djvu/47

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du Chev. Grandisson.

dans son opiniâtreté, comme pour défier ceux qui l’ont reçu avec tant d’amitié ? Mon cœur lui faisoit secrettement ces reproches. Il m’a semblé d’abord, que je n’y prenois pas d’autre intérêt que celui de son salut. Mais ensuite, m’étant apperçue qu’il étoit nécessaire à mon bonheur, & toujours résolue néanmoins de renoncer à lui, s’il ne devenoit pas Catholique, j’ai tourné tous mes soins à sa conversion, dans l’espoir de tout obtenir de l’indulgence de mes Parens, & persuadée que de sa part il se feroit un honneur de notre alliance, si nous pouvions l’emporter sur ce point.

Mais lorsque j’ai désespéré de le fléchir, j’ai pris la résolution de tourner mes efforts sur moi-même, & de vaincre ma passion, ou de mourir. Ô Madame ! qu’il m’en a coûté dans ce combat ! Mon Confesseur m’a remplie d’épouvante par les menaces du Ciel. Ma Femme de chambre n’a pas cessé de me tourmenter. Mes Parens m’ont pressée en faveur du Comte de Belvedere. Le Comte m’a importunée par ses soins. Le Chevalier est venu augmenter la persécution, en me parlant pour le Comte. Juste Ciel ! Que faire ! À quoi me déterminer ! Pas un instant de repos, ni de liberté pour réfléchir, pour déliberer, pour me rendre compte à moi-même de mes propres sentimens ! Comment aurois-je pris ma Mere pour ma confidente ? Mon jugement étoit en guerre avec ma passion, & j’espérois