lady, que rien ne puisse former de nouveaux nuages. Mais je suis sans crainte. Je veux jouir avec reconnoissance du moment présent, & laisser la disposition de l’avenir au grand Moteur de tous les événemens. Si votre Frere est à moi, s’il répond à mes sentimens par les siens, que peut-il m’arriver à quoi je ne me soumette avec résignation ? Mais permettez, charmantes Sœurs, que je vous fasse une ou deux questions.
Dites-moi, vous souvenez-vous que la crainte ou l’incertitude m’aient jamais causé quelque tourment ? A-t-il réellement existé un homme qui s’appelle Sir Hargrave Pollexfen ? Ne vous ai-je pas raconté mes songes, lorsque je vous ai dit ce que je croyois avoir souffert de ses persécutions ? Il est bon, pour me conserver dans un juste sentiment d’humilité, que toutes ces souffrances, tous ces tourmens subsistent par écrit dans mes Lettres, sans quoi je pourrois oublier aujourd’hui que je me sois jamais crue malheureuse.
Et de grace, Mesdames, pourriez-vous m’apprendre ce qu’est devenue ma maladie ? J’étois en fort mauvaise santé, vous vous en souvenez, Mylady G…, lorsque vous nous avez fait l’honneur de venir passer quelques jours ici ; si mauvaise, que je ne pus la cacher, comme je l’aurois souhaité, ni à vous, ni à mes autres Amis. Il ne me sembloit point que le mal fût de la nature de ceux dont la guérison dépend du contentement du cœur. J’étois si convaincue du mérite de Clémentine, & de ses droits à la qualité de Mylady