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du Chev. Grandisson

Allez, lui dis-je, allez, petite Badine, & me laissez dormir. Le jour que vous desirez arrivera ; mais ce n’est pas demain. Elle parut un peu confuse de ma réponse. Cependant, s’étant remise aussi-tôt, & baissant les yeux : Si c’eût été pour demain, reprit-elle avec la naïveté que vous lui connoissez, j’avois une grace à vous demander. Eh, quelle grace, chere Émilie ? De m’apprendre ce que doit faire une honnête Femme, pour se conserver toute sa vie l’affection d’un Homme. Son ingénuité me toucha. Vous êtes charmante, lui dis-je en l’embrassant de toutes mes forces. Il est trop tard, ma chere, pour entrer dans une si grande question : mais, en deux mots, soyez toujours telle que vous êtes, je veux dire, telle que vous paroissez à M. Belcher, depuis qu’il vous aime : on ne cesse pas d’aimer ce qui ne cesse pas de paroître aimable. J’y joins, ajoutai-je, ce que je me souviens d’avoir entendu répéter cent fois à la sage Madame Sherley : la complaisance, l’égalité d’humeur, & la propreté, sont trois chaînes dont un cœur amoureux ne sort jamais. Je la congédiai, fort satisfaite de cette réponse ; & je me livrai au plus doux sommeil.

C’est donc aujourd’hui, ma chere Grand-Maman, c’est aujourd’hui, ma chere Tante, que vous devez vous représenter une compagnie brillante, sortant du Château de Grandisson, à dix heures du matin, dans la vue, annoncée par Sir Charles, de faire