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XIII
préface

Par la nudité chaste, par la gloire de la nature, si cela est immoral, eh bien ! alors, vive l’immoralité ! Vive cette immoralité superbe et saine, que j’ai l’honneur de pratiquer après tant de génies devant qui l’humanité s’agenouille, après tous les auteurs anciens, après nos vieux maîtres français, après le roi Salomon lui-même, qui ne mâchait guère sa façon de dire, et dont le Cantique des Cantiques, si admirable, lui vaudrait aujourd’hui un jugement à huis clos. Immoral je suis donc, et immoral je resterai, me trouvant en trop noble compagnie pour chercher mieux. En dépit de toutes les critiques et même de toutes les magistratures du monde, je n’arriverai jamais à comprendre en quoi la franchise et la sincérité outragent les bonnes mœurs, je continuerai à les outrager plutôt que d’emburelucoquer mes phrases ainsi que des catins dans un peignoir de dentelles, et je renonce définitivement à l’estime des honnêtes gens, s’il faut, pour l’obtenir, savoir tremper ses doigts dans certaines cuvettes comme si on y prenait de l’eau bénite.

J’ai dit tout à l’heure : primo, la forme ! Me voilà forcé de mettre ici : secundo, le fond ! Secundo, donc, si tu l’exiges, le fond !

Mon style mis ainsi hors de cause, reste à examiner