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les blasphèmes


Dieu te ferme à jamais son jardin solitaire
Et tourne à l’éternel exil tes pas maudits.
Mais malgré lui tu peux être heureux. C’est sur terre
Qu’est le vrai Paradis.

Dieu, s’amusant à voir souffrir sa créature,
T’a dit : « Gagne ton pain aux sueurs de ton front. »
Moi, je ferai pour toi pulluler la nature
Et tes fils en vivront.

Pour te rendre odieux à ta compagne aimée,
Dieu mit l’enfantement dans le sang et les pleurs.
Moi, je t’offre une couche où la femme pâmée
Oubliera ses douleurs.

Quand elle te tiendra sur sa gorge et sa bouche,
Tout pantelant d’amour entre ses deux genoux,
Vous jouirez assez pour que ce Dieu farouche
En devienne jaloux.

Et ce que j’ai promis, je l’ai tenu. Paresses,
Plaisirs, amour, et les rires du nouveau-né,
Et les baisers profonds, et les longues caresses,
Je vous ai tout donné.