Aller au contenu

Page:Richepin - Les Blasphèmes, 1890.djvu/177

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
167
LA MORT DES DIEUX

Tout un tableau, dans tous ses détails, jusqu’au moindre.
Mais cet éclair semblait lui-même se rejoindre ;
Car j’avais beau pousser mon cheval haletant,
A mesure que tout fuyait, au même instant
Tout réapparaissait, et toujours tout de même :
L’homme-torche, le gril, le grand colosse blême,
Et les crucifiés qui pleurent à rebours,
A droite, à gauche, en haut, en bas, toujours, toujours !
Et dans la rauque voix du feu qu’on alimente,
Dans le crépitement de la viande fumante,
Toujours le même cri, toujours le même vœu ;
Toujours, comme un refrain : Dieu le veut ! Dieu le veut !


*


Aussi, quand las et tout en nage,
Hors de la plaine et hors du val,
Loin du bûcher et du carnage
Je suis descendu de cheval,
Quand, prêt à respirer l’aurore,
J’ai vu que les hommes encore,
Aimant ce Dieu qui les dévore,
Le vénéraient comme un aïeul,