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LES MORTS BIZARRES

— Je reconnais ce costume-là, pensa-t-il, c’est évidemment Marius. Mais où diable est Jean ? Je voudrais les voir tous les deux, afin de tirer sûrement mes deux coups. Celui-ci dort ! C’est bien. Mais l’autre ?

Il fit du bruit assez pour attirer l’attention de celui qui était caché, pas assez pour réveiller le dormeur. Cette fois Jean entendit parfaitement, et distingua même que ce bruit venait du souterrain.

— Marius, dit-il, est-ce toi ?

Et, sortant de l’ombre du rocher, il se montra à son tour à la lumière.

Tout à coup, un coup de feu retentit. Jeanne se dresse en poussant un cri déchirant, et retombe sur le dos. Jean, qui avait bondi vers elle à son cri, reçoit comme un coup de poing dans la poitrine, et tombe sur les genoux, atteint aussi par une balle.

En même temps il entend quelqu’un sauter dans la grotte en craint :

— Jeanne ! Jeanne ! ma fille ! j’ai tué ces misérables ! Où es-tu ?

Jean se releva et se trouva face à face avec Barbellez.

— Ta fille, lui cria-t-il, tiens, regarde, bourreau ! Elle avait les habits de Marius. C’est elle que tu viens de tuer…

— Qui ? où ? ma fille !

— Là ! là, par terre. C’est Jeanne.

Comme Barbellez se penchait vers elle, Jean, fou de douleur, ramassa ses forces, ravala son sang qui lui montait à la gorge, et prenant Barbellez par les deux pieds, le souleva en l’air d’un élan furieux.