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Page:Richepin - Mes paradis, 1894, 2e mille.djvu/43

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X

LE BON VIN


J’ai lu chez un docteur chrétien, fin raisonneur,
Que le tout premier pas dans le sentier oblique,
Loin du salut, se fait dès l’instant qu’on s’applique
À chercher dans la vie, ici-bas, le bonheur.

« Y souffrir est, dit-il, notre lot, notre honneur.
« Péché, de se soustraire à l’arrêt sans réplique !
« Y rêver même, c’est déjà diabolique,
« C’est prendre goût au vin du vieil empoisonneur. »

Nous qui ne croyons plus à ton ciel peuplé d’anges,
Docteur, nous en cuvons nos plus belles vendanges
Et nous nous en soûlons, de ce vin défendu,

Sans peur, puisque ton ciel nous est inaccessible,
D’avoir pour dernier dieu le Maître au pied fendu,
Le seul qui parle encor d’un paradis possible.