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254 MÉTAPSYCHIQUE SUBJECTIVE

gramme d'iodoforme, au bout de dix ans cette armoire sentira encore l'iodoforme. Alors quelle lucidité étonnante, au cas où toute la race humaine serait dépourvue d'odorat, si, après dix ans, un jour quelque individu, doué de sensibilité olfactive transitoire, venait dire : « Il y a eu de l'iodoforme dans cette armoire».

Déjà nous avous quelque peine à comprendre la finesse de l'o- dorat dont sont doués certains animaux, par exemple comment les papilloDs mâles sont attirés à des distances considérables par l'odeur du papillon femelle, comment un chien peut suivre à la trace, dans une prairie, le lièvre qui y a passé il y a une heure. Nous sommes surpris, mais enfin nous comprenons, tant bien que mal, qu'il y a là hyperesthésie extrême d'un sens que nous possé- dons à l'état rudimentaire. Si nous étions dépourvus totalement de ce sens, nous ne comprendrions plus rien du tout.

Revenons à l'individu qui, exceptionnel parmi les hommes, est, de temps à autre, capable de percevoir quelques vagues sensations olfactives. S'il ne peut pas analyser son imparfaite, et rudimentaire, et fugitive sensation, il sera très embarrassé pour expliquer pour- quoi il a dit : « Il y a du fumier à gauche, il y a des violettes à droite. » Comme sa sensation est fugace, il essaiera de la faire revenir, mais elle aura disparu, et il ne trouvera plus rien. Il a dit : « Il y a là des violettes, » et soudain l'odeur des violettes a dis- paru. Il ne sait même pas pourquoi il a dit : a II y a là des violettes. » Cette connaissance, dont il ne se rend pas compte, a traversé sa pensée comme un éclair, et maintenant il est devenu pareil aux autres hommes. Il n'a plus la moindre sensibilité olfactive : il ignore même ce que c'est qu'une odeur. Il sait qu'il a eu l'idée des violettes, et voilà tout. Plus il essaiera d'approfondir, moins il com- prendra ce qui lui a fait dire : « Voilà des violettes ! »

Assurément, il ne faut pas prendre celte analogie pour autre chose qu'une analogie. Tout de même, nous pouvons, grâce à cet exemple, concevoir comment certaines vibrations du monde exté- rieur, éveillant des notions confuses et passagères, sont capables de nous arriver et de nous donner des connaissances dont l'origine nous est impénétrée et peut être impénétrable.

C'est dans le domaine de l'inconscient que se meuvent ces idées, ces connaissances. Le moi conscient en est à peine ébranlé. Lodge

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