Page:Richomme - Contes chinois, précédés d'une Esquisse pittoresque de la Chine, 1844.pdf/150

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dence et de leur étourderie. Il est aussi quelques vieillards qui, séduits par l’audace et la vivacité des jeunes gens, préfèrent, leur compagnie à celle des hommes de leur âge ; ils ont la faiblesse de les suivre, et ils sont entraînés avec eux dans le premier piège qu’on leur tend.

— Retenez bien cette leçon, enfants, dit Siang qui s’était approché sans être vu ; les paroles de Tchoung-ni sont celles d’un sage.


II


Une multitude immense encombrait les alentours du palais de Tséou. Le sse-keou, ou chef de la magistrature du royaume, homme vénéré dans toute la Chine, devait tenir son audience publique et prononcer sur une cause délicate. Trois mois auparavant, un homme du peuple s’était présenté devant le tribunal, accusant son fils de l’avoir insulté, et réclamant contre lui toute la rigueur des lois. Le magistrat, au lieu de condamner aussitôt le fils, suivant l’usage antique, avait fait conduire en prison le père et le jeune homme, et ils y étaient depuis cette époque. On attendait donc avec impatience le jugement définitif. Les deux prisonniers amenés devant le tribunal, le sse-keou demanda au père de quel crime il accusait son fils.

— Il n’est pas coupable ! s’écria aussitôt le père. Dans un accès de colère, dont je me repens avec sincérité, je suis venu l’accuser ; mais si quelqu’un doit être puni, c’est moi.

— Je m’en étais douté, reprit le magistrat avec bonté ; allez, instruisez votre fils de ses devoirs. Et vous, jeune homme, n’oubliez pas que la piété filiale est la première des vertus.