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MA CAPTIVITÉ DANS LES PRISONS DE SÉOUL.

qu’habitués à ces sortes d’exécutions et dévorés par la faim, laissèrent tous leur tasse de riz, sans pouvoir en avaler un grain. Le malheureux est pris, conduit dans la chambre où on lui passe la corde au cou, on ferme la porte du dehors, quatre gardiens saisissent l’extrémité de la corde et sans émotion tirent comme des matelots hissant une voile ; puis, quand ils ont bien serré, ils attachent la corde solidement à un morceau de bois placé là à cette fin. L’exécution était faite. Deux heures après, un jeune gardien alla regarder par la fente de la porte et se sauva disant et riant : « Il remue encore les jambes. » On serra de nouveau la corde. Cette exécution se fit sans bruit, on n’entendit ni cri, ni soupir de la victime. J’ai décrit ce supplice au long, car c’est ainsi que des centaines, pour ne pas dire des milliers de chrétiens ont été exécutés, pendant la persécution de 1866 et 1868.

Le soir ou pendant la nuit, on ouvrit la porte ; aussitôt je vis que de tous les cabanons, tous les païens se mirent à cracher avec force ; c’était pour empêcher l’âme du supplicié de venir habiter en quelque coin de la prison. Nous avions, à cette époque, avec nous, deux sorcières qui se firent surtout remarquer en cette circonstance ; pendant plus de trois minutes elles jetèrent ainsi