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Mgr RIDEL.

il ne reste plus que le roulis ; bientôt l’orient en feu nous fait présager une belle journée. Où étions-nous, où avions-nous été jetés par la tempête ? Telle était la question que nous nous posions, lorsqu’un matelot fait remarquer un point noir qui a bientôt grossi ; c’est une terre, dans la direction que nous avions prise : plus de doute, c’est la Chine. Nous étions sauvés ! Puis on signale un vaisseau européen ; il vient vers nous. J’ordonne de passer tout à côté et je fais hisser un petit drapeau tricolore que j’avais eu soin de préparer avant de quitter la Corée. C’était un beau trois-mâts ; j’ai appris depuis qu’il était de Saint-Malo et venait de Tché-fou. En passant, je lui fais un grand salut. Le capitaine, qui nous regardait avec attention, très étonné de voir flotter un drapeau français sur une si singulière embarcation, qui n’était pas même chinoise, me répond de la manière la plus gracieuse ; puis, sur son ordre, on met le drapeau. J’attendais avec anxiété ; c’était le drapeau de la France ; trois fois il s’élève et s’abaisse pour nous saluer. Impossible de vous dire ce qui se passa dans mon cœur. Pauvre missionnaire, depuis six ans je n’avais pas vu de compatriotes ! Et, en ce moment, perdu au milieu des mers, sans connaître la route, j’aurais