Page:Rignano, La question de l’héritage, 1905.djvu/48

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rait à des gens sûrs pour retourner aux enfants après retenue d’un pourcentage comme rémunération du service rendu. Le but visé serait ainsi complètement manqué. Et quand, effectivement, le testateur distribuerait la partie de sa fortune non transmissible à ses enfants à ses parents les plus proches et — ceux-ci ne suffisant pas à l’épuiser — aux plus éloignés ou même à des amis, on parviendrait sans doute par là à égaliser davantage les fortunes privées et à en empêcher les disproportions énormes actuelles, mais on courrait d’autre part le risque de mettre, en plus des enfants des testateurs, beaucoup d’autres personnes, qui auraient dû travailler et se rendre utiles a la société, à même de vivre aussi dans l’oisiveté. Ce serait agrandir, au lieu de la restreindre, tout une catégorie d’inconvénients nés du fait de l’héritage. Si d’ailleurs le testateur dotait du surplus de sa fortune des « établissements d’utilité publique », on serait exposé au danger d’un immense gaspillage de précieuses forces productrices. Car le but principal de ces établissements ne serait pas l’utilité publique, mais l’assouvissement de la vanité des donateurs. On pourrait craindre aussi un pullulement de ces institutions de bienfaisance qui, par leur multiplicité et la façon dont la charité y est comprise et pratiquée, ont sur le caractère moral du peuple et l’ensemble de l’économie sociale une action funeste et

    objection à notre point de vue, enlèverait cependant toute raison d’être à la concession faîte au testateur de disposer aussi de la partie restante de son patrimoine.