Page:Rignano, La question de l’héritage, 1905.djvu/70

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

un arrangement de la propriété qui maintiendrait de légères différences initiales dans la « course au succès », s’il garantissait en même temps le maximum du bien-être collectif.

Pour ce qui est de la cinquième de nos conditions, elle vise, on se le rappelle, l’actualisation de la loi darwinienne du triomphe du plus apte. Cette loi est entravée, ou même complètement renversée, grâce aux avantages artificiels dont jouissent aujourd’hui les familles épuisées et dégénérées. Il est clair qu’en avantageant uniquement et d’une façon rapidement décroissante le fils, ou le fils et le petit-fils du capitaliste accumulateur, on retarderait à peine d’une ou de deux générations l’action de la loi darwinienne. En effet, si le patrimoine de l’aïeul de par l’incapacité du premier ou des deux premiers héritiers, n’augmentait pas du tout, le petit-fils ou l’arrière petit-fils n’aurait dans sa « course au succès », aucune sorte d’avantage artificiel[1].

Enfin on se convaincra sans peine que les conditions secondaires que nous avons indiquées sont également remplies par notre projet.

  1. L’usage ancien du majorat, qui subsiste encore pour une partie de l’aristocratie anglaise, a déjà produit, et continue à produire, en Angleterre, des effets analogues. Grâce à lui, les puînés n’ayant aucun avantage artificiel remarquable dans la lutte économique, seuls les plus actifs, les plus hardis de ceux-ci parviennent à faire fortune, à se mettre en état de fonder une famille et à laisser ainsi des descendants héritiers de l’esprit d’initiative de leurs pères.