Page:Rimbaud - Lettre du baron de Petdechèvre, 1949.djvu/31

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Versailles, 9 septembre 1871

La France est sauvée, mon cher Anatole, et vous avez bien raison de dire que j’y ai grandement contribué. Mon discours — je devrais dire notre discours — n’a pu trouver place dans la fameuse discussion, mais j’en ai prononcé dans le couloir, au milieu de nos amis, l’entraînante péroraison. Ils hésitaient… Ils ont voté. Veni, vidi, vici ! J’ai compris cette fois l’influence que je puis exercer un jour sur certains groupes parlementaires.

Du reste, j’en avais eu le pressentiment, à mon dernier congé, lorsque ma blonde et intelligente Sidonie, assistant à notre répétition, s’écria : « Papa ! tu me fais je ne sais quoi quand tu te prends au sérieux ! »

Tu me fais je ne sais quoi !… Ô adorable aveu ! Je portais dans ce jeune cœur le trouble de l’éloquence, et ce trouble est le précurseur de la persuasion. (Répétez ma phrase au curé, en faisant le mistigri.)