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Page:Ringuet - L’héritage, 1946.djvu/134

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le sacrilège

les yeux sans douleur rivés à cette chair, la sienne, qui brûlait et qu’il ne sentait pas.

Itiarii bondit comme une bête, poussa un long hurlement et, les mains devant elle, se jeta par la porte ouverte dans le gouffre de la nuit. Quant à Toupaha, il se balançait sur son escabeau en disant de façon cadencée une phrase ridicule.

— Manéa néa… manéa néa… ! C’est ennuyeux… c’est ennuyeux… !

Tout à coup, repoussant son siège d’un coup de jarret, il recula vers le coin opposé à celui où se tenait Lémann. Puis il se coula le long du mur comme une ombre plate, saisit au passage la main de Bernier qu’il entraîna dehors dans une course éperdue.

Le lendemain matin, à l’aube, sans attendre que le jour fut levé, la Potii-Raiatéa, toutes voiles dehors à l’alizé, franchissait la passe de Vavaou.

Toupaha était collé à la roue, les yeux fixes, la langue sèche entre les lèvres.

Et quand à l’horizon le mont Taimanou ne fut plus qu’une fumée légère, le matelot découvrit dans un coin de la cale, écrasée, les cheveux défaits, le paréo déchirée, le pied saignant d’une large blessure, une femme toujours belle et qui était Itiarii.