10 mars — Rencontré par hasard Louise ; elle n’a pas embelli !
12 mars — Les journaux annoncent que des savants américains ont entrepris une étude SCIENTIFIQUE du sommeil et DE SES CONSÉQUENCES. Qu’en tireront-ils ?
14 mars — Les expériences américaines se poursuivent. C’est passionnant !
Arriveront-ils aux mêmes conclusions que moi ?
D’ailleurs à quelles autres conclusions pourraient-ils en arriver ?
15 mars — Un des sujets de l’expérience raconte que passées les premières trente heures, il a ressenti un bien-être profond. Mais il a succombé. Alors il a dormi vingt-trois heures d’affilée. Ses premiers mots ont été :
17 mars — Changé de situation. Quelle vie !
Reçu une lettre de Saint-Hyacinthe. Rien à faire. J’aurais dû suivre ma première idée.
21 mars — Rencontré Bernèche. Toujours le même : outrageusement gai. Il s’est vanté devant moi de dormir onze heures par jour. Là-dessus, je lui ai demandé : « Et le RÉVEIL ?… » Il n’a pas compris.
Quel crétin !
26 mars — Il y a trente-six heures que je n’ai à peu près rien mangé.
27 mars — L’idée du réveil me hante depuis que j’ai lu le récit détaillé des expériences américaines.
S’endormir n’est pas une joie, car l’esprit répugne à l’anéantissement. Mais c’est au moins la plongée dans l’inconscience. Ce qui est horrible, c’est le réveil ; le retour à la vie consciente ; à la conscience de la vie.
Il faudrait ne jamais s’endormir, afin de n’avoir jamais à s’éveiller.