Page:Rinn - Un mystérieux enlèvement, 1910.djvu/149

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lui, tout conspirait à réveiller le souvenir, à entretenir la fièvre. Chaque courrier apportait des lettres de parents, d’amis, d’inconnus, qui toutes le complimentaient ; toutes aussi parlaient de vengeance, de châtiment à tirer des coupables. Lui, dans sa lassitude, faisait bon marché de la vengeance. Même il souhaitait la grâce des coupables, pourvu qu’elle lui épargnât la peine de s’occuper d’eux.

Le passé était passé. Que ne le laissait-on vivre le présent, sans le contraindre à revivre des jours pleins de douloureux souvenirs ? Les demi-révélations de Sourdat n’étaient pas étrangères à cet état d’esprit. Sourdat avait conseillé le silence. On semblait donc désirer l’impunité pour certains. Pourquoi ne pas étendre cette clémence à tous ? La question le troublait. Quelque rancœur qu’il gardât de son aventure, maintenant qu’il était libre il eût accepté qu’on n’en parlât plus. Mais l’affaire appartenait à la politique. Il n’était en son pouvoir ni de la diriger ni d’en suspendre les suites. L’intérêt général dominait le sien et réglait sa conduite. Pas plus que les prévenus il n’était maître de se soustraire à l’enquête.

Il chercha donc, en prévision de sa prochaine entrevue avec le Ministre et avec le Premier Consul, à se renseigner. Il interrogea les siens, questionna les domestiques, compara ce qu’ils avaient vu à ce que lui-même avait pu voir, s’appliqua à prévenir toute erreur, toute présomption reposant sur de pures apparences. La pensée qu’un innocent payât le crime d’un autre lui pesait.

D’abord il s’employa en faveur de Cassenac et de Monnet. Confronté avec eux le 22, en présence