Page:Rinn - Un mystérieux enlèvement, 1910.djvu/210

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ces malheureux détenus, contre lesquels je n’ai conservé aucune animosité, et dont la condamnation, quelque forte qu’elle puisse être, me fera éprouver, si elle arrive, un sentiment profondément pénible qui me suivra toujours. Je connais le cœur humain ; je connais l’égarement des passions dans la jeunesse ; je connais surtout beaucoup trop à quels excès épouvantables l’esprit de parti et l’exagération réciproque des opinions ont conduit, depuis dix ans, de malheureux jeunes gens qui n’étaient point nés pour le crime, pour le vol, pour l’assassinat, et qui s’en sont rendus coupables dans la malheureuse tourmente qui nous agite depuis si longtemps. Mais je veux vous faire part seulement des nouvelles peines auxquelles nous condamne encore le malheureux procès qui va recommencer devant vous.

» Des citations pour aller témoigner vont sans doute m’enlever encore les nommés Métayer, Pierre Créhelleau, et Anne Tasse, trois domestiques qui me sont de toute nécessité ici ; notre respectable amie Mme Bruley, femme de soixante-six ans, très infirme, et qui demeure ici avec nous. Tout cela dans un moment où j’ai le plus grand besoin de secours, étant gisant depuis un mois sur une chaise longue, par suite d’une blessure à la jambe.

» Ce n’est pas là le pire. On va sans doute assigner aussi les domestiques de ma campagne. L’un d’eux, nommé Lebrun, est mon régisseur. Son épouse est là notre femme de charge. Le nommé Mary est notre jardinier. Ma maison et mes propriétés vont rester à l’abandon, exposées au pillage. J’ai quarante arpents de vigne à vendanger,