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LE BER

— « Ohé ! Nicolas, ce n’est pas le temps de faire de l’abattis. » — « Quand viendra le temps des abattis, j’attaquerai la grande forêt ; pour astheure, cet érable suffit. Je l’ai choisi entre tous, parce qu’il est le plus fort ; entre mille je l’ai choisi, parce qu’il est le plus droit. Voyez comme l’écorce est rude, et comme le cœur est franc »… Et vlan ! dans le bois vert s’enfonce le taillant de la bonne hache, et vlin ! dans l’air volent les éclats.

« Il y a des mois que je l’ai choisi. Un soir, à l’heure où, la journée faite, on regarde fumer la terre au soleil qui tombe, ma jeune femme m’a dit son espérance ; tête découverte, j’ai répondu : « Dieu soit béni ! » Puis, du seuil de notre chaumière lui montrant, à l’orée du bois, cet arbre plus beau que les autres : « Pour faire le ber, c’est « celui-là que j’abatterai ! »… Et vlan ! le taillant de la bonne hache s’enfonce plus

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