peu tard, et que leurs Ecrivains ont repris les choses de trop haut. Des Poëmes tirés de la Bible[1], où tout respire un air patriarcal, & qui annoncent des mœurs admirables, n’auront de charmes que pour une Nation simple & sédentaire, toujours sans ports & sans commerce, et qui ne sera peut-être jamais réunie sous un même Chef. L’Allemagne offrira longtemps le spectacle d’un Peuple antique & modeste, gouverné par des Princes amoureux des modes & du langage d’une Nation polie & corrompue. D’où il suit que l’accueil extraordinaire que ces Princes & leurs Académies ont fait à un idiome étranger, est un obstacle de plus qu’ils opposent à leur Langue, & comme une exclusion qu’ils lui donnent.
La Monarchie Espagnole pouvoit, ce semble, fixer le choix de l’Europe. Toute brillante de l’or de l’Amérique, puissante dans l’Empire, maîtresse des Pays-Bas & d’une partie de l’Italie, les malheurs de François Ier lui donnoient un nouveau lustre, & ses espérances s’accroissoient encore des troubles de la France & du mariage de Philippe II avec la Reine d’Angleterre. Tant de grandeur ne fut qu’un éclair. L’expulsion des Maures et les émigrations en Amérique,
- ↑ Ce sont des Poëmes sur Adam, fur Abel, sur Tobie, sur Joseph, enfin sur la Passion de J. C. Ce dernier Poëme, intitulé la Messiade, jouit d’une grande réputation dans l’Empire : la Mort d’Abel est plus connue en France. M. Klopstok a écrit la Messiade en vers hexamètres, & M. Gesner n’a employé pour sa Mort d’Abel qu’une prose poétique. J’ignore si la Langue Allemande a une prosodie assez marquée pour supporter la versification Grecque & Latine. Elle a d’ailleurs des vers rimés, comme tous les Peuples du monde.