Page:Rivarol - De l'universalité de la langue française.djvu/53

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vier, voulut imiter : c’étoit un nouvel hommage. Des essaims d’ouvriers entrerent en France & en rapporterent notre Langue & nos Arts qu’ils propagerent.

Vers la fin du siecle, quelques ombres se mêlerent à tant d’éclat ; Louis XIV, vieillissant, n’était plus heureux. L’Angleterre se dégagea des rayons de la France & brilla de sa propre lumiere ; de grands esprits s’éleverent dans son sein : sa Langue s’étoit enrichie, comme son commerce, de la dépouille des Nations ; Pope, Addison & Dryden en adoucirent les sifflements, et l’Anglais fut, sous leur plume, l’Italien du Nord : l’enthousiasme pour Shakespéare et Milton se réveilla ; & cependant Loke posoit les bornes de l’esprit humain ; Newton trouvoit celles de la Nature.

Aux yeux du sage, l’Angleterre s’honoroit autant par la philosophie, que nous par les arts ; mais puisqu’il faut le dire, la place étoit prise : l’Europe ne pouvoit donner deux fois le droit d’aînesse & nous l’avions obtenu ; de sorte que tant de Grands-hommes, en travaillant pour leur gloire, illustrerent leur patrie & l’humanité, plus encore que leur Langue.