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beaucoup de belles œuvres telles que le « Port de la Rochelle » et le « Beffroi de Douai » chantaient sur ses murs la gloire de Corot. Désormais, la place manqua pour accrocher les chefs-d’œuvre et ils s’accumulèrent les uns sur les autres. Des brassées de dessins admirables, adjugés à vil prix, boudèrent les cartons qui s’étaient déjà emplis à la vente d’Eugène Delacroix.

Les tableaux du maître, qui avaient attendu si longtemps la faveur du public, commencèrent, quand la source fut tarie, à exciter la convoitise des amateurs. La spéculation s’en mêla. Des galeries se formèrent, puis se dispersèrent sous le marteau du commissaire-priseur. M. Robaut fut là, suivant les expositions et les ventes. Sa compétence reconnue fit autorité. Marchands et acheteurs l’invoquèrent contre les faussaires, dont l’audacieuse industrie se développa avec la vogue du peintre. Tous les experts s’inclinèrent devant ses expertises.

Quelques mois après la mort de Corot, dans le courant de 1875, on organisa à l’Ecole des Beaux-Arts une exposition solennelle composée d’environ deux cents de ses toiles, empruntées, pour la circonstance, aux collections privées et aux musées. L’occasion était bonne pour saisir au passage bien des morceaux inconnus, momentanément révélés. Grâce aux nombreuses photographies faites par la maison Braun et aux croquis dont il couvrit lui-même ses tablettes, M. Robaut conserva de cette réunion un souvenir aussi complet que possible. Trois ans plus tard, en 1878, une manifestation également brillante eut lieu dans les galeries de M. Durand-Ruel. L’Exposition Universelle avait marchandé à Corot la place que réclamait son génie. Il triompha rue Laffitte, et le scrupuleux enquêteur dessina un par un les éléments de ce triomphe.

Entre temps, son travail sur Delacroix s’achevait. Il vit le jour au moment où s’ouvrirent simultanément l’exposition de son œuvre à l’Ecole des Beaux-Arts et la souscription pour son monument du Luxembourg. L’auteur de ce livre si instructif et si vivant préparait son « Corot » sur le même modèle, et l’ouvrage était annoncé : des bulletins de souscription circulaient. Le succès très limité de son premier volume, sans ralentir le zèle du travailleur, retarda du moins la publication du nouveau. Les années passèrent. On voyait tou-