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LES MENDIANTS DE PARIS

Les mendiants, comme ils l’ont dit, sont réunis en assemblée solennelle pour recevoir un nouveau membre dans une société constituée par eux, et dont ils vont bientôt nous expliquer le but philanthropique.

En ce moment, ils se rangent en ligne régulière ; chacun prend l’air grave et composé ; la physionomie individuelle de l’assemblée fait place à celle d’un corps plus ou moins constitué.

Le récipiendaire est à côté du président. La séance est ouverte, et le père corbeau a la parole.


XVI

noces et festins

Le discours du président commença en ces termes :

— Tas de vagabonds, gueux et fainéants, voulez-vous bien me faire plaisir de vous taire, ou sinon je me fâche !

C’est que, malgré l’injonction faite précédemment, tout le monde murmurait, parlait, glapissait dans un crescendo désespérant.

— Silence donc, canaille ! ajouta Corbillard à l’exorde du président. Le silence est la leçon des rois qui abusent de leur position.

— Toi, monsieur Porte-en-Terre, reprend Corbeau grondant, si tu prétends par là jeter une pierre dans mon jardin, je te prouverai que toute vieille corneille que je suis, j’abats autre chose que des noix.

— Pas de bruit ! murmurent plusieurs voix… la paix… nous ne sommes pas ici pour nous amuser… La parole est au président.

— Je rappellerai à tous les bons camarades, dit Corbeau, et particulièrement à toi, Eustache, qui viens entrer dans notre sein, que la congrégation des fricotteurs a pour but de les faire tous boire et manger comme Gargantua, le héros des temps passé ; mais que, indépendamment de cette mission sérieuse, nous sommes encore associés pour nous secourir et nous aider les uns les autres. Ainsi, une supposition : tu as de la fièvre, Eustache, ou toute autre bêtise ; tu te dis : C’est bon, je vais m’étendre dans mon lit, le médecin de la société viendra me voir, et je recevrai de plus dix sous par jour pour la tisane, tout le temps que j’aurai ma fièvre… Hein ! rien qu’en son-