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les mendiants de la mort

assouvir les instincts cupides, et le mendiant de la cour n’eut qu’un pas à descendre pour arriver au mendiant de la ville.

Bientôt naquit entre eux l’idée d’une association d’après laquelle Rocheboise accompagnerait et seconderait Friquet dans ses excursions, et partagerait les bénéfices que pourraient amener son expérience du monde et son aspect vénérable.

C’était pour s’entretenir des clauses de ce traité que Rocheboise se rendait un matin dans la rue Saint-Jacques, au logis de M. Friquet.

Il entra comme le mendiant à domicile était à sa toilette. Celui-ci indiqua un siège au vieux comte, et revenant se poser devant son petit miroir, continua d’abattre la moitié d’un favori dont la première avait déjà disparu sous le rasoir.

— Vous permettez… dit-il à Rocheboise. Nous pouvons également causer.

— Je vous en prie.

— Et d’abord, avez-vous touché quelque chose au ministère ?

— Trente misérables francs !… sur les fonds secrets… et encore m’a-t-on prié de n’y plus revenir… des ingrats !

— Le mot est juste… vous les avez entourés de sollicitudes… Eh bien, il faut vous attacher à une autre branche… nous travaillerons ensemble…

— Je suis venu pour cela… Pourquoi diable coupez-vous vos favoris ?

— Parce que les sœurs doe Saint-Vincent-de-Paul n’en portent pas.

— Ah ! je comprends… vous me donnerez des conseils… des instructions.

— Allons donc ! avec votre intelligence, vous en saurez demain autant que moi… Auriez-vous la bonté de me passer ce jupon ?

— Le voici. Vous êtes religieuse, et vous allez quêter pour…

— Avez-vous lu hier des journaux ?

— Sans doute.

— Eh bien, vous avez dû voir un article ainsi conçu : « On apprend à l’instant que l’une des principales maisons de l’ordre de Saint-Vincent-de-Paul, établie à Granville, a été dévorée par les flammes. Nous déplorons sincèrement le malheur qui vient de frapper une congrégation