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les mendiants de la mort

dict a été rendu, répondit Pasqual à ce regard ; les paroles du jugement ne sont pas arrivées jusqu’à vous… ce n’est pas la peine de mort qui a été prononcée.

Un frisson parcourut les veines d’Herman ; il entrevoyait la vérité.

— C’est la peine du bagne à perpétuité, acheva Pasqual.

Herman se leva droit, livide… puis retomba sur l’escabelle, la tête penchée dans ses mains,

— Vous étiez l’assassin, je n’étais que le complice, reprit Pasqual ; mais le nom des comtes de Rocheboise d’un côté, celui d’un homme du peuple de l’autre, ont rétabli l’équilibre : on nous a condamnés à la même peine.

Un long silence régna dans le cachot.

Mais dans ce moment-là on entendait au loin le mouvement causé par l’arrivée d’un détachement de soldats qui venait doubler la garde de la prison, où se trouvait un certain nombre de condamnés près de partir pour le bagne. Les paroles du commandant retentissaient sous la voûte d’entrée, le roulement du tambour se prolongeait dans les profondes murailles, et ce bruit de la force armée répondait aux paroles de Pasqual comme un sinistre écho.

Herman leva ses deux mains jointes et ses yeux brûlants de larmes.

— J’espérais la mort, dit-il, la mort qui vient si vite et qui nous régénère. Mais cette vie d’opprobre !… Qu’ai-je fait, mon Dieu, pour mériter un tel supplice !…

Il s’arrêta comme regardant en lui-même.

— Ce que j’ai fait ? reprit-il ; mais tout ce qu’il fallait pour mériter ce sort… Je ne sais plus comment… par quelle fatalité… Mais il y a partout dans ma vie d’horribles fautes…

Pasqual secoua la tête et dit d’un ton d’assurance hautaine :

— Vous n’en avez commis qu’une seule… et il y a si longtemps, que celle-là vous l’avez sans doute oubliée… Les autres ne vous appartiennent pas, c’est moi qui vous les ai fait accomplir.

À cette bizarre assertion de l’ami le plus dévoué, Herman crut que la raison du malheureux s’égarait.

Mais Pasqual, qui s’était levé, se trouvait dans le rayon lumineux répandu à l’intérieur par le haut soupirail, et