Page:Robert - Les Mendiants de la mort, 1872.djvu/63

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
59
les mendiants de la mort

Elles restèrent ainsi tous les jours suivants. Herman ne continua pas moins de venir à la mansarde, et de demeurer triste et résigné devant ces persiennes fermées.

Mais il s’aperçut enfin que cette persistance n’avait d’autre résultat que de priver Valentine de la seule occupation qui pût remplir sa triste solitude.

Valentine peignait au peu de clarté répandue dans son intérieur. Un jour, lorsque la lumière vint à manquer sur sa toile, elle se leva pour ouvrir un peu plus les persiennes, mais s’étant aperçu que de la croisée voisine des regards restaient obstinément attachés sur elle, elle se laissa retomber à sa place et resta la main oisive, la tête penchée dans une attitude d’ennui et de découragement. Herman s’arracha de la croisée, cacha son visage dans ses deux mains et pleura amèrement.

— Ô mon Dieu ! dit-il, moi qui ai déjà été fatal à cette femme si noble, si généreuse, si digne d’adoration ; moi qui lui ai tout ôté, je la prive encore de la clarté du jour, de ce dernier des biens laissé au plus misérable de la terre… moi qui donnerais ma vie pour elle, mon Dieu !

Pendant quelques jours, il se condamna à rester éloigné de la fenêtre. Au bout de ce temps, comme si son sacrifice eût dû lui être payé, il eut un vif mouvement de joie.

On venait tout à coup d’ouvrir en plein les persiennes du pavillon.

C’était Diamant en personne, qui, seul à la maison, et prenant l’air à la fenêtre, avait reconnu Herman, son maître bien-aimé, à la croisée voisine, et lui témoignait sa joie de le revoir par un grand nombre de signes aimables et affectueux.

Puis, dès que la porte s’ouvrit, le lévrier s’élança au dehors et courut du côté où il avait aperçu Herman. Celui-ci ne le fit pas attendre, et lui rendit ses caresses du plus profond de son cœur.

Le jeune et beau Diamant, autrefois également ami d’Herman et de Valentine, n’était point entré dans les différends qui avaient pu s’établir entre eux. Et depuis le jour où le hasard lui fit retrouver son maître, il revint le voir le plus souvent qu’il lui fut possible, sans consulter le bon plaisir de personne.

C’était une grande douceur pour le pauvre proscrit de posséder ainsi quelques instants ce bel animal qui respi-