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les mendiants de la mort

— Ne dirait-on pas que le feu est à la maison, à vous entendre crier ainsi, répondit le vieux mendiant avec impatience. Qu’y a-t-il ? que voulez-vous ?

— Oh ! mon Dieu, ce que je veux !… Mais il y a un instant François est sorti désespéré… il est allé… je ne sais où… se jeter b la rivière peut-être… il ne voulait pas voir ses enfants mourir de faim !…

— Et puis, après ?… Parlez donc au lieu de pleurer !

La petite fille, ne pouvant plus se soutenir, venait de s’affaisser contre la robe de sa mère, qui la soutenait d’un bras.

— Ma pauvre enfant ! s’écria la malheureuse femme… Hélas ! si jeune ! elle s’est aperçue que je ne mangeais pas pour laisser un peu de pain à ses deux petits frères… elle a voulu faire comme moi… elle a eu moins de force pour supporter la faim… Ange de bonté et d’amour… va !…

Le visage délicat et touchant de la pauvre petite créature devenait d’une pâleur livide ; ses yeux se fermaient ; elle penchait sa tête, que ses longs cheveux venaient envelopper comme un voile funèbre… Cette enfant, se laissant mourir pour donner sa misérable part de nourriture à sa famille, eût attendri le cœur d’un tigre.

— À la fin, c’est que ça m’embête, moi, dit le père Corbeau… Parlerez-vous, madame François ?

— Il n’y a plus rien ! plus rien chez nous !

— Les temps sont durs pour tout le monde…

— Prêtez-moi un peu d’argent !… Oh ! si peu que vous voudrez !…

— De l’argent !… et où le prendrais-je, miséricorde !

— Que je puisse faire vivre encore un jour… un seul jour… ma pauvre petite !…

— Je vous ai prêté deux francs cinquante sur votre couverture… qui n’en valait pas la moitié… avez-vous un autre gage à me donner ?

— Oh ! rien !… rien !… répondit la malheureuse femme en se tordant les mains.

— Point de gage, point d’argent… bonsoir !

La petite fille en ce moment baissa la tête, ses mains se détendirent ; elle lâcha la robe de sa mère à laquelle elle était attachée, et tomba évanouie ou morte… sur le palier.

La mère jeta un cri qui partait du fond des entrailles.