Aller au contenu

Page:Robert Brasillach - La Mort en face (1946).djvu/17

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.


Et pour vous les derniers venus,
Compagnons des sombres journées,
Ô captifs des cachots reclus
Gardez ces heures condamnées,
Gardez le froid, gardez l’ennui :
Pour ceux qui ne les auraient plus,
Ce sont des trésors eux aussi,
Avec vous, je les ai connus.

Quelques ombres, quelques visages
Ont droit encore à quelques grains.
Finissons vite le partage
Avant que vienne le destin.
Tous ceux-là, qui garçons ou filles
Sont venus couper mon chemin,
Peuvent bien dans la nuit qui brille
Attendre avec moi le matin.

Pour eux tous, j’avais les mains pleines
Elles sont vides maintenant
Des images les plus lointaines,
Du passé le plus émouvant.
Je ne garde pour emporter
Au delà des terres humaines,
Loin des plaisirs de mes étés,
Des amitiés qui furent miennes,

Que ce qu’on ne peut m’enlever
L’amour et le goût de la terre,
Le nom de ceux dont je rêvais
Au cœur de mes nuits de misère,
Les années de tous mes bonheurs
La confiance de mes frères,
Et la pensée de mon honneur
Et le visage de ma mère.

Fresnes, le 22 janvier 1945.