Page:Robert Brasillach - Le Procès de Jeanne d'Arc (1941).djvu/70

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jour que je sois délivrée. Et je veux avoir congé de vous le dire : aussi je demande un délai.

L’Évêque. — Les voix vous ont-elles défendu de dire vérité ?

Jeanne. — Voulez-vous que je vous dise ce qui ne va qu’au roi de France ? Il y a moult de choses qui ne touchent pas le procès. Je sais bien que mon Roi gagnera le royaume de France, et cela je le sais bien comme je sais que vous êtes devant moi en juges. Je serais morte, n’était la révélation qui me conforte chaque jour.

L’Évêque. — Qu’avez-vous fait de votre mandragore ?

Jeanne. — Je n’ai point de mandragore, et oncques n’en eus. Mais j’ai oui dire que proche mon village, il y en a une, mais n’en ai jamais vu aucune. J’ai ouï dire que c’est chose périlleuse et mauvaise à garder ; je ne sais toutefois à quoi cela sert.

L’Évêque. — En quel lieu est la mandragore dont vous avez ouï parler ?

Jeanne. — J’ai oui dire qu’elle est en terre, proche l’arbre dont j’ai parlé, mais ne sais le lieu. J’ai aussi ouï dire qu’au-dessus de cette mandragore il y a un coudrier.

L’Évêque. — À quoi avez-vous oui dire que sert la mandragore ?

Jeanne. — J’ai oui dire qu’elle fait venir l’argent. Mais je n’en crois rien. Mes voix ne m’en ont jamais rien dit.

L’Évêque. — En quelle figure était saint Michel, quand il vous apparut ?

Jeanne. — Je ne lui vis pas de couronne ; et de ses vêtements je ne sais rien.

L’Évêque. — Était-il nu ?

Jeanne. — Pensez-vous que Dieu n’ait de quoi le vêtir ?

L’Évêque. — Avait-il des cheveux ?

Jeanne. — Pourquoi les lui aurait-on coupés ? Je n’ai pas vu le bienheureux Michel depuis que j’ai quitté le château du Crotoy. Je ne le