Page:Robert Chénier - Barreaux (1945).djvu/35

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Les chefs qui lâchent leurs garçons,
Ceux qui s’enfuient, ceux qui sont riches,
Boivent sec dans leurs réveillons
De la Bavière et de l’Autriche,
Mais nous autres, dans nos prisons,
Nous sommes contre ceux qui trichent.

Je t’adopte, Noël d’ici,
Bon Noël des mauvaises passes ;
Tu es le Noël des proscrits
De ceux qui rient dans les disgrâces
Des pauvres bougres qu’on trahit
Et des enfants de bonne race.

Nous savons qu’au dehors, ce soir,
Les amis et les cours fidèles,
Les enfants ouvrent, dans le noir,
Malgré le sommeil, leurs prunelles,
Évoquent l’heure du revoir
Et tendent leurs mains fraternelles.

Et pour revoir, gens du dehors,
Le vrai Noël de nos enfances,
Il suffit de fermer encor
Nos yeux sur l’ombre de l’absence
Pour dissiper le mauvais sort,
Et faire flamber l’espérance.