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des écumeurs de l’atmosphère. Les attaques nocturnes ne sont pas rares, malgré la surveillance de la police aérienne et spécialement du corps de gendarmerie atmosphérique, dont les hommes et les patrouilles sillonnent sans cesse les régions dangereuses au-dessus de Paris.

Mais les malfaiteurs, bien que traqués à outrance, trouvent assez souvent moyen de mettre la surveillance en défaut et s’abattent la nuit des couches supérieures de l’atmosphère, comme des éperviers sur leur proie, sur de bons bourgeois revenant de soirée ou sur des maisons où quelque bon coup à faire leur a été signalé par des complices.

Les assaillants de l’aérocab étaient des gens pleins d’expérience ; en deux minutes, M. Ponto et sa compagne furent dévalisés, et leur mécanicien lui-même fut débarrassé de sa montre. L’opération terminée, les malfaiteurs remontèrent dans leur véhicule et abandonnèrent leurs victimes.

Il n’y avait qu’une chose à faire. Gagner le plus prochain poste de police et faire sa déclaration. Immédiatement, quatre gendarmes munis du signalement de l’aérocab des voleurs, se lancèrent dans des directions différentes.

M. Ponto reconduisit. Mlle Rosa et rentra ensuite chez lui assez contrarié.

Il eut des nouvelles de ses voleurs dès le lendemain. Les gendarmes lancés sur la piste, parvenus à une certaine hauteur, avaient masqué les fanaux de leurs hélicoptères pour ne pas se laisser apercevoir. Ils décrivaient dans les airs de vastes cercles et couraient des bordées depuis près de deux heures sans avoir rien aperçu de suspect, lorsque du côté de Fontainebleau, à près de douze cents mètres d’altitude, ils aperçurent un point lumineux, se déplaçant lentement dans l’atmosphère.

« Vérifions ! » dit le brigadier en resserrant sa troupe et en courant droit à l’aréostat en panne.

Arrivés bord contre bord sans être signalés, les braves gendarmes firent irruption dans l’aérostat et se trouvèrent en présence d’une société d’aspect douteux, jouant avec acharnement au lansquenet. L’aérostat était un tripot clandestin où toute la nuit se jouait un jeu d’enfer et qui prenait au matin l’honnête aspect d’une aéro-berline. Les joueurs furent tenus d’exhiber leurs papiers ; il y avait là quelques jeunes viveurs, naïfs pigeons mêlés à des grecs de profession. Parmi ces derniers, les gendarmes reconnurent les voleurs de M. Ponto, encore nantis des bijoux et du portefeuille du banquier ; leur coup fait, ils avaient remisé leur aérocab marron et s’étaient empressés de gagner le tripot aérien.