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Le Vingtième Siècle.

Raphaël Ponto, un de ces soleils de la Bourse autour desquels gravite en humbles satellites la foule des petits millionnaires. La lycéenne blonde se nommait Hélène Colobry ; elle était orpheline et pupille du banquier Ponto, cousin éloigné de sa famille.
Une Lycéenne.

Hélène Colobry, appuyée sur la balustrade de la plate-forme, regardait avec une certaine mélancolie filer sous la nacelle les innombrables toits, les cheminées, les belvédères, les coupoles, les tours et les phares de l’immense Paris. — Peut-être songeait-elle à son isolement d’orpheline et voyait-elle avec appréhension se rapprocher rapidement les horizons de Saint-Germain et les opulents quartiers de Chatou et du Vésinet, aux splendides hôtels émergeant d’une forêt de grands arbres. Ses compagnes allaient trouver à la station un père et une mère les bras ouverts et le cœur bondissant ; elle, la pauvrette, aurait pour toutes effusions une poignée de main d’un tuteur qu’elle n’avait pas vu depuis près de huit ans, depuis le jour déjà lointain de son départ pour le lycée de Plougadec-les-Cormorans, dans le Finistère.

Tout au contraire d’Hélène, Mlles Ponto étaient en gaieté. Leurs yeux couraient alternativement de l’horloge électrique de l’aéronef aux coteaux blancs de maisons des bords de la Seine.

« C’est inouï, Barnabette, disait l’une, dix minutes pour aller du boulevard Montmartre au parc de Boulogne, nous ne marchons pas !

— Ces omnibus sont ridicules ! répondait l’autre ; vois-tu que j’avais raison, Barbe, de vouloir prendre un aérocab ! nous serions arrivées……

— C’est parce que c’est plus amusant, l’aéronef-omnibus…… il y a du monde, c’est plus gai……

— Moi, je trouve ces omnibus assommants…… ça me rappelle nos vieilles guimbardes d’aéronefs du lycée, quand on nous emmenait à 4 000 mètres prendre l’air et entendre une conférence du professeur de physique ;…… au moins là, je dormais !

— Nous n’allons pas très vite, dit Hélène, à cause de la grande circulation : à Paris, il faut encore une certaine prudence ; nous pourrions accrocher quelque autre omnibus et recevoir des avaries…… Mais prends patience, Barnabette, dans huit ou dix minutes nous serons à Chatou.