Page:Rocheblave - Pages choisies des grands ecrivains - George Sand.djvu/54

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pas rassurés sur le succès de leur entreprise ; car on peut venir dans la journée pour lever les scellés à l’improviste, et tout est resté en désordre dans l’appartement. D’ailleurs les principales pièces de culpabilité n’ont pas encore été retrouvées et anéanties.

Heureusement cette terrible journée d’attente s’écoula sans catastrophe. Mon père porta Xérina chez un ami ; Deschartres acheta pour mon père des pantoufles de lisière, graissa les portes de leur appartement, mit en ordre ses instruments, et n’essaya pas de changer l’héroïque résolution de son élève. Lorsqu’il me racontait cette histoire, vingt-cinq ans plus tard : « Je savais bien, disait-il, que si nous étions surpris, madame Dupin ne me pardonnerait jamais d’avoir laissé son fils se précipiter dans un pareil danger ; mais avais-je le droit d’empêcher un bon fils d’exposer sa vie pour sauver celle de sa mère ? Cela eût été contraire à tout principe de saine éducation, et j’étais gouverneur avant tout. »

La nuit suivante ils eurent plus de temps. Les gardiens se couchèrent de meilleure heure ; ils purent commencer leurs opérations une heure plus tôt. Les papiers furent retrouvés et réduits en cendres ; puis on rassembla ces cendres légères dans une boite que l’on referma avec soin et que l’on emporta pour la faire disparaître le lendemain. Tous les cartons visités et purgés, on brisa plusieurs bijoux et cachets armoriés ; on enleva même des écussons sur la couverture des livres de luxe. Enfin la besogne terminée, tous les scellés furent