Page:Rocheblave - Pages choisies des grands ecrivains - George Sand.djvu/56

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

LA MERE DE GEORGE SAND

Maurice Dupin, le père de George Sand, âme héroïque et tête un peu folle, s’était épris d’une jeune Française qu’il avait rencontrée à Milan dans une de ses campagnes. Divers incidents traversèrent cet amour romanesque et l’attisèrent. Maurice Dupin cacha longtemps sa passion à sa mère : la femme qu’il voulait épouser était d’humble origine, fille d’un pauvre oiselier. Il prévoyait les orages qui ne manquèrent pas de survenir lorsqu’il se fut marié en cachette, et que le secret fut découvert. Sa courte existence en fut dès lors assombrie. Mais il resta toujours sous le charme de cette fille du peuple, nature d’artiste à sa façon, riche organisation que George Sand s’est complue à décrire.


Ma mère était une grande artiste manquée faute de développement. Je ne sais à quoi elle eût été propre spécialement, mais elle avait pour tous les arts et pour tous les métiers une aptitude merveilleuse. Elle n’avait rien appris, elle ne savait rien ; ma grand’mère lui reprocha son orthographe barbare et lui dit qu’il ne tiendrait qu’à elle de la corriger. Elle se mit, non à apprendre la grammaire, il n’était plus temps, mais à lire avec attention, et peu après elle écrivait presque correctement et dans un style si naïf et si joli, que ma grand’-