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le descendant des Tombol et des Zuber d’Argo, couvrirait l’Égypte contre l’envahissement du Soudan.

Les Barbarins ne sont pas intéressants seulement pour leurs qualités morales : voisins immédiats des Égyptiens, ils en diffèrent essentiellement par le type physique, et se distinguent non moins des nomades de race Kushite[1] qui les entourent de toutes parts, et auxquels ils ne s’allient pas.

Se fondant sur l’identité de langue, on leur attribue la même origine qu’aux misérables nègres du Dar Nuba, traqués dans les montagnes du Kordofan, au sud de Lobeïd, dont on fait ainsi, avec Pritchard, leur première patrie. Ce n’est point ici le lieu d’entrer dans une discussion scientifique de cette assimilation ; je n’ai pour cela ni la compétence nécessaire, ni la disposition de documents anthropologiques précis, lesquels font encore, je crois, un peu défaut. Mais je ne puis m’empêcher de reporter mon souvenir sur ces représentants des tribus Nobawia[2], que j’ai interrogés pendant un séjour que je fis, en 1877, à Wadi-Halfa, à l’époque des hautes eaux, c’est-à-dire au moment de l’affluence des gellabs[3] ; il m’a semblé alors qu’il y avait tout un monde, au point de vue de l’intelligence et des traits, entre eux et leurs prétendus frères. Je les ai trouvés plus dégradés que les autres esclaves nègres convoyés avec eux, et les rapports des voyageurs me confirment que je n’ai pas eu là une impression de circonstance.

En fait, les Barbarins, tels que nous les voyons aujourd’hui,

  1. J’entends par Kushites les tribus de même race que les nomades Bishari, Hadendos, Beni-Amer, dont la langue est apparentée avec l’ancien égyptien, et qui occupent en majorité les déserts du Soudan égyptien et la portion du continent africain bornée par le Nil et la Mer Rouge, y compris l’Abyssinie et les territoires Galla et Somali, soit qu’elles aient conservé leur idiome ancien, soit qu’elles aient appris une langue sémitique.
  2. C’est-à-dire du Dar Nuba.
  3. Ceux qui font le commerce d’importation ; en particulier, marchands amenant en Égypte les produits du Soudan et, naguères, des caravanes d’esclaves.