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EPISTRE.

Ce brief diſcours ſur vn tel argument
Soit bien receu de ton entendement,
Ma fille unique, & de moy cher tenue,
Non pour autant que tu en es venue
Et que dans toy ie me voy vn pourtraict
Du poil, du teint, de la taille, & du traict,
Façon, maintien, parolle, contenance,
Et l’aage ſeul en faict la difference :
Ny pour nous voir tant ſemblables de corps,
Ny des eſprits les gracieux accords,
Ny ceſte douce aymable ſympathie,
Qui faict aymer la ſemblable partie,
N’ont point du tout cauſé l’entier effect
Demon amour enuers toy ſi parfaict,
Ny les efforts mis en moy par nature,
Ny pour autant qu’és de ma nourriture.
Mais le penſer, qu’entre tant de mal-heurs,
De maux, d’ennuis, de peines, de douleurs,
Suiection, tourment travail, triſteſſe,
Qui puis treze ans ne m’ont point donné ceſſe,
Tu as, enfant, apporté vn cueur fort,
Pour reſiſter au violent effort
Qui m’accabloit, & m’offris dès enfance
Amour, conſeil, ſupport, obeiſſance.
Le tout puiſſant à qui i’eu mon recours,
A faict de toy naiſtre mon ſeul ſecours :
Or ie ne puis de plus grands benefices
Recompenſer tes louables offices,
Que te prier de faire ton deuoir