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Page:Rod - L’Innocente, 1897.djvu/95

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présence, — on partait toujours de l’idée que je ne comprenais rien, — mon père raconta toute leur conversation. Je compris si bien, qu’aujourd’hui même, je me la rappelle dans ses grandes lignes, et que je ne m’éloignerai certainement pas beaucoup de la vérité en la résumant :

Le colonel. — Docteur, c’est à vous que je m’adresse. Vous n’êtes pas seulement un médecin, vous êtes un homme…, le seul que je connaisse dans ce misérable trou… Voyons, dites-moi ce qui se passe ?

Mon père (embarrassé, cherchant à esquiver une explication difficile qui, de plus, lui semblait inutile). — Ce qui se passe, monsieur ?… Que voulez-vous dire par là ?… Que je sache, il ne se passe rien.

Le colonel (impatient). — Ne faites pas semblant de ne pas comprendre, je vous en prie ! Vous voyez bien que… les choses ne sont pas dans leur ordre habituel… Comment ! ma fille va sonner chez Mme d’Ormoise, et cette pécore refuse de la recevoir !… Moi-même, j’avais des doutes depuis plusieurs jours : oui, oui, la mine des gens ne me revenait pas… Et hier soir, je suis allé au cercle… pour la première fois depuis… la catastrophe Eh bien, docteur, ils sont tous partis les uns après les autres !… Personne pour ma partie d’écarté… Je suis resté maître du terrain… Et le tenancier me faisait des