cutons un peu, voulez-vous ?… Nous sommes seuls, ici, ma fille et moi… Nous avons des ennemis, à ce qu’il paraît… Du diable, si je m’en serais jamais douté… Nous en sommes entourés, docteur !… Ils nous menacent… Il faut bien connaître le danger pour le combattre !
Mon père (après avoir réfléchi un instant). — Pour le combattre ! Est-ce qu’on peut le combattre ?… Connaissez-vous un moyen de combattre la calomnie ?
Le colonel. — Ah ! c’est donc de la calomnie ?
Mon père. — Que voudriez-vous que ce fût d’autre ? Est-ce que la calomnie n’est pas le fléau des petites villes ? Est-ce qu’elle ne surgit et ne se développe pas d’elle-même partout où il y a un mystère ?
Le colonel (après un silence). — Ainsi, l’on nous calomnie ?
Mon père. — Pas vous.
Le colonel. — Alors, ma fille ?… Ah ! mille tonnerres ! Qu’est-ce qu’on ose dire d’elle ?…
Mon père. — Oh ! qu’importe ? Qu’importe le mensonge ? Il se transforme, il se multiplie, il change de couleurs tous les jours. Ce qu’on peut dire d’une jeune femme, vous pouvez l’imaginer sans qu’il soit besoin de préciser…
Le colonel. — Ah ! les misérables, les menteurs, les bandits !… Elle qui est pure, elle qui est vaillante, elle qui est noble !…