Page:Rodenbach - Bruges-la-Morte, Flammarion.djvu/118

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un des couvents principaux du religieux enclos.

C’était une des meilleures, une des seules joies de Barbe d’aller au Béguinage. Tout le monde l’y connaissait. Elle y avait plusieurs amies parmi les béguines, et rêvait, pour ses très vieux jours, quand elle aurait amassé quelques économies, d’y venir elle-même prendre le voile et finir sa vie comme tant d’autres — si heureuses ! — qu’elle voyait avec une cornette emmaillotant leur tête d’ivoire âgé.

Surtout par ce matin de mars adolescent, elle exultait de s’acheminer vers son cher Béguinage, d’un pas encore alerte, dans sa grande mante noire à capuchon, oscillant comme une cloche. Au loin, des tintements semblaient s’accorder avec sa marche, sonneries de paroisse unanimes, et, parmi elles, tous les quarts d’heure, la musique grêle, chevrotante du carillon, un air comme tapoté sur un clavier de verre…