Page:Rodenbach - Bruges-la-Morte, Flammarion.djvu/177

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rement : il vivait en une sorte de concubinage.

Or si la Religion dit vrai, si les chrétiens sauvés se retrouvent, il ne reverrait jamais, lui, la Regrettée et la Sainte, pour ne point l’avoir exclusivement désirée. La mort ne ferait qu’éterniser l’absence, consacrer une séparation qu’il avait crue temporaire.

Après, comme maintenant, il vivra loin d’elle ; et ce sera vraiment son supplice éternel de toujours s’en souvenir en vain.

Hugues sortit de l’église dans un trouble infini. Et, depuis ce jour-là, l’idée du péché tourna en lui, tournoya, enfonça son clou. Il aurait bien voulu s’en délivrer, être absous. La pensée de se confesser lui vint pour atténuer le désemparement, le chavirement d’âme où il glissait. Mais il fallait se repentir, changer de vie ; et, malgré les griefs, les peines quotidiennes, il ne se sentait plus la force de quitter Jane et de recommencer à être seul.