Page:Rodenbach - La Jeunesse blanche, 1913.djvu/85

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
82
SOIRS DE PROVINCE.


L’âme des quartiers morts et des pauvres enclos,
L’âme éparse du peuple au fond des terrains vagues,
Du peuple tristement joyeux, pareil aux vagues
Dont l’écume chantante est pleine de sanglots.

L’âme des vagabonds, des forains sans asile
Et des vieux chiens perdus par les chemins lépreux,
Où des flaques d’eau morte ont un air douloureux
Comme des yeux crevés d’où le soleil s’exile !

Oh ! ces orgues, le soir, par les lointains faubourgs,
Rythmes plaintifs cognant aux vitres des lanternes,
Et venant consoler, près des mornes casernes,
L’âme des déserteurs pleurant dans les tambours.