Page:Rodenbach - Les Tristesses, 1879.djvu/105

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

C’est lui qui répétait les calculs compliqués
Sur les grands tableaux noirs pendus à la muraille ;
Et tous les écoliers, sans avoir l’air qui raille,
Les coudes sur le banc, recueillaient ses leçons.

Le soir, il revenait, le cœur plein de chansons,
Mettait une autre blouse, et mangeait quelques tranches
De pain blanc, en cherchant sur chacune des planches
Le petit plat friand gardé pour son retour.
Puis après les devoirs, les jeux avaient leur tour :
Il oubliait alors concours, chiffres, grammaire,
Courait avec son chien, sortait avec sa mère,
Souriait aux enfants tapageurs du faubourg
Qui jouaient aux soldats, précédés d’un tambour ;
Empêchait les garçons et les petites filles
De gêner ses amis qui s’amusaient aux billes
Jusqu’à l’heure où la nuit noircissant l’horizon,
Lassés, les fit rentrer chacun dans leur maison.

Lorsqu’ils avaient soupe dans la cuisine basse,
Petit-Pierre prenait un livre de la classe
Et, feuilletant la table afin de faire un choix,
Lisait une touchante histoire à haute voix.
Les parents rayonnaient !… Ils respiraient à peine