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LA RUE BOUCHERAT.

rut à la fenêtre, traînant ses pieds nus sur le carreau. Le crieur était parti.

— Par pitié, mon frère, dit le marquis, calme-toi. Mon Dieu ! qu’il me tarde de te savoir hors d’ici ! Te quitter en ce moment me semble un crime…

— Encore une fois, Maurice, tu dois partir avec ce fidèle serviteur. Ne viens-tu pas d’entendre le coup de tonnerre qui vient d’éclater là-bas ? En ce moment peut-être il y a deux mondes qui croulent, deux mondes, l’ancien et le nouveau. Marquis de Langey, partez ; vous arriverez peut-être encore à temps pour sauver le domaine que M. de Boullogne vous a laissé. De grâce, hâtez-vous. Il y a là-bas, au cimetière de Saint-Marc, des dépouilles mortelles qui vous sont chères !… Baisez ce sol en entrant, baisez-le, Maurice, car l’épée de l’ange du mal va bientôt l’entr’ouvrir et en disperser les cendres au vent ! Partez ; il me reste encore ici un ami près de mon chevet, c’est ce digne maître, qui m’a offert un asile dans sa maison et qui vous remplacera !

Il avait posé sa main sur celle de La Boëssière. Les pleurs empêchaient seuls le maître d’armes de répondre… Les diverses émotions de cette scène avaient achevé de briser Saint-Georges… Un morne silence succédait à ses paroles.

En ce moment une des épées, mal accrochée sans doute, se détacha de la tapisserie et tomba. La Boëssière la renoua avec respect et revint se placer près du lit où les yeux du malade s’étaient fermés. — Il mâchait encore entre ses dents une des feuilles de la petite rose blanche…