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LE CHEVALIER DE SAINT-GEORGES.

— Ne me tuez pas devant M. de Saint-Georges ! épargnez-moi !

— Pourquoi nous gêner devant le chevalier, madame ? ces lettres ne lui ont-elles pas appris nos affaires ? Il est au courant de notre commerce amoureux ! — Chevalier, continua-t-il en saluant Saint-Georges avec un impitoyable sang-froid, permettez qu’à cette heure je m’occupe seul du sort de Mme de Langey…

— Que voulez-vous dire, monsieur ? demanda la créole avec angoisse, est-ce une raillerie ?… Prétendriez-vous employer avec moi la violence ?

— Pas le moins du monde, madame, nous sommes dans la maison du chevalier. Je vais vous donner le bras pour en sortir ; j’ai ma voiture qui vous conduira chez moi.

— Chez vous ! s’écria-t-elle d’une voix altérée par la frayeur, chez vous ! oh ! jamais ; j’aime mieux que l’on me fue ?

— On ne tue pas les femmes, marquise de Langey ! mais ce sont les femmes qui font tuer… vous le savez ! Votre main ! reprit-il avec une douceur affreusement ironique, votre main ! Partons.

Et Tio-Blas saisit la main de Mme de Langey. La malheureuse n’avait que trop compris l’impossibilité d’une résistance… elle se voyait à la merci de son bourreau.

— Mais c’est un abominable forfait ! dit-elle en jetant un coup d’œil de supplication au chevalier, qui regardait sans doute cette nouvelle scène comme trop au-dessous des pensées qui l’agitaient pour y in-