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LE PALAIS-ROYAL

volât pas son bijoutier. Embourbé dans les plus basses passions, il avait eu soin de les relever, il est vrai, par son entourage ; les plus brillans et les plus lestes d’entre les gentilshommes l’escortaient. À côté de cet amas de chair nommé le gros duc, il se distinguait par toute la licence d’une jeunesse sans frein. Nous nous garderons bien d’allonger ici le portrait de ce prince, que nous n’allons retrouver que trop souvent comme une tache dans le cours de ce récit. Il n’arborait pas encore à cette époque le pavillon de la résistance, mais il s’était rangé sous celui de tous les vices. Accusé d’avoir tiré sur un de ses piqueurs en chassant dans la plaine de Saint-Denis, il avait déjà à répondre aux mille inculpations que lui jetait comme un défi la voix publique. Voulait-il se soustraire à ces terribles murmures par l’étourdissement de sa vie ? Prévoyait-il les représailles de l’opinion ? Il est difficile de le croire en le suivant pas à pas dans cette carrière où la confiance en son infamie le soutint.

Le Palais-Royal, pour être déjà aussi ouvertement brouillé avec la cour qu’il le fut depuis, n’en recevait pas moins un grand éclat de ses propres illustrations. Dans cette cour, dont Mme de Montesson était le centre, Saint-Georges apparut comme une véritable excentricité, sa couleur en faisait un être à part.

En regard des beaux de Trianon, le Palais-Royal, qui avait aussi ses archives galantes, inscrivit le nom du mulâtre.

Le mulâtre devint le protégé, l’amant de l’épouse d’un prince du sang, qui se rappelait avoir vu chasser