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Page:Roger de Beauvoir - Le Chevalier de Saint-Georges V1, 1840.djvu/264

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LE CHEVALIER DE SAINT-GEORGES.

odieux, je ne l’avais commis que pour vous : aussi, par les brûlantes savanes que je parcourais, vous retrouvais-je incessamment à mes côtés comme un mauvais ange… Vous me paraissiez, dans de sinistres visions, heureuse de cette délivrance ; vous me tendiez les bras, et je m’y précipitais comme dans une anse où le vent du remords ne soufflerait pas !

« Le curé de Saint-Marc me crut ; il reçut mon offrande pour le service funèbre, où j’assistai seul avec mes deux compagnons. Le terrain payé, je partis ; l’air que je fendais sur les monts, l’horrible fardeau dont je me sentais affranchi, ramenèrent chez moi des momens de calme dont je profitai pour vous écrire. Vous savez ma lettre, je vous y racontais le duel de M. de Langey ; — ce duel était un mensonge !… La seule vérité contenue dans cette lettre, c’était l’invariable amour dont je protestais, un amour, Caroline, dont vous ne pouviez soupçonner le désespoir !… En effet, même en vous parlant de retourner bientôt près de vous, je savais que je ne le pourrais pas ; qu’outre les soupçons que ce prompt départ ferait naître, après ma déclaration du duel de M. de Langey au curé de Saint-Marc, je n’aurais jamais le courage de vous aborder pauvre, ruiné ! Il me fallait attendre un mois pour présenter aux orfèvres de l’île mes diamans de Bannique et de Saint-Jean ; larcins dangereux à monnayer, d’après les nouveaux édits du gouverneur, qui prévenait les colons de ces déprédations successives opérées par des hommes assez habiles pour demeurer inconnus. Faut-il vous le dire d’ailleurs ? je ne voulais pas me mettre