Page:Rojas - Lavigne - La Celestine.djvu/21

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pas de beaucoup antérieur à la continuation et qu’il ne peut avoir été écrit par Juan de Mena ou par quelque autre de ses contemporains de la première moitié du quinzième siècle[1]. Sans aucun doute, si le continuateur de la Célestine est parvenu à imiter le style du premier acte de manière à rendre toute différence insensible, la haute réputation de l’œuvre comme monument littéraire, comme modèle de la langue-romance espagnole, ne permet pas de croire que Rojas ait cherché à se former un style rétrograde et à écrire, en 1491, comme on écrivait cinquante ans auparavant. Il est bien évident que, quoique riche et formée dès le commencement du siècle, la langue, au temps de Mena, ne l’était pas au point où la Célestine l’a placée.

Le style de cette œuvre ne peut donc appartenir à l’époque de don Juan II, et il faut en chercher l’auteur dans des temps plus modernes. Il nous resterait Rodrigo Cota, le seul écrivain de la seconde moitié du quinzième siècle sur lequel se soient arrêtés les doutes des savants qui ont parlé de la Célestine. Mais quelles sont les autres œuvres de Cota qui puissent aider à fonder cette assertion ? A-t-on conservé de lui, a-t-il écrit autre chose que le Dialogue entre l’Amour et un vieillard et les Coplas de Mingo Revulgo ? Le style de ces deux œuvres poétiques a-t-il quelque analogie, quelque air de famille avec le style du premier acte de la Célestine ? Assurément non ; aucune comparaison n’est possible entre un écrit en prose et une œuvre en vers. Cota n’a rien laissé en prose ; les

  1. Nicolas Antonio fait remarquer en effet que le style de Mena aussi bien que le style de son siècle sont fort différents de celui de la Célestine.