Page:Rojas - Lavigne - La Celestine.djvu/79

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prudence ne peut exister que chez les vieillards. Tu es bien enfant.

Parmeno. Une douce pauvreté est le bien le plus précieux.

Célestine. Mais dis plutôt comme Maro, la fortune favorise l’audace. Enfin, quel est l’homme riche dans la république qui veuille vivre sans amis ? Dieu soit loué, tu possèdes quelque bien ; ne sais-tu pas que tu as besoin d’amis pour le conserver ? Ne pense pas que ton intimité avec ce seigneur te fasse grand profit ; plus la fortune est grande, moins elle est solide ; dans toutes les infortunes, le remède le plus sûr, ce sont les amis. Où trouveras-tu plus facilement cet avantage, que là où se réunissent les trois genres d’amitié ? Je veux dire ceux qui procurent le bien, le profit et le plaisir. Pour le bien, considère la volonté de Sempronio unie à la tienne, et la grande similitude de caractère qui existe entre vous deux. Pour le profit, il est entre vos mains si vous êtes d’accord. Il en est de même pour le plaisir : vous êtes d’âge à goûter toute espèce de jouissances, c’est pour cela que les jeunes gens se réunissent plus volontiers que les vieillards ; pour jouer, pour s’habiller, pour rire, pour manger et boire, pour traiter les affaires d’amour, ils font tout de compagnie. Oh ! si tu voulais, Parmeno, quelle heureuse vie nous mènerions ! Sempronio aime Élicie, la cousine d’Areusa.

Parmeno. D’Areusa !

Célestine. D’Areusa.

Parmeno. D’Areusa, la fille d’Élisée ?

Célestine. D’Areusa, la fille d’Élisée.

Parmeno. Est-il possible

Célestine. En vérité.

Parmeno. C’est une chose merveilleuse.

Célestine. Cela te semble bien ?

Parmeno. Je ne connais rien de mieux.