Je reçois à la fois vos deux lettres des 19 et 22 ; elles viennent de nous être remises par l’ami Bosc. La célérité de la correspondance tient à l’attention de choisir les jours du départ du courrier ; il n’y en a que deux ici par semaine, c’est pourquoi je m’empresse de vous tracer un mot ce soir, car je sors demain de bonne heure pour aller à l’Assemblée nationale[2] où votre compatriote[3] m’a ménagé une place ; et si je ne vous écrivais dans ce moment, il faudrait remettre la partie à lundi.
Je pense qu’actuellement vous avez vu Abauzit, et que vous n’aurez pas trouvé inutile la lettre pour les quakers qui ont maintenant leur assemblée générale à Londres ; ces amis de l’humanité doivent goûter votre projet et pourront concourir à son exécution. Je ne sais ce que deviendra le Cercle social ; la querelle de ménage que l’abbé Fauchet y a rendue publique m’a fait une vraie peine et ne peut être que nuisible à cette association. Je savais alors qu’il était question quelque part de le nommer à un évêché, et qu’il en était instruit ; je me suis persuadée, peut-être à tort, que c’était à cause de cela qu’il se montrait si chatouilleux sur l’interprétation de ses sentiments religieux et l’inexactitude qu’avait commise Bonneville en citant quelques-unes de ses phrases.
La nomination a eu lieu, et l’abbé Fauchet est évêque du département du Calvados. Son éloquence et son talent étaient le soutien, l’aliment et la gloire des séances du Cercle social ; j’imagine qu’il y fera ses adieux vendredi, et j’irai l’entendre ; après lui, je ne sais ce que deviendra cette Société.
Je n’ai rien à ajouter à ce que nos amis vous ont marqué ; vous transmettre les faits d’une part, et les jugements de l’autre, c’est vous mettre à même de les combiner avec votre propre situation et de vous déterminer pour ce que vous seul pouvez voir être le mieux. Ce que je peux dire, c’est que, dans des moments aussi solennels, il n’y a que le sentiment de ce mieux et la volonté